Mort d'une héroïne rouge, de Qiu Xiaolong
Points Policier, janvier 2003, 501 pages
Death of a red heroine traduit de l'anglais par Fanchita Gonzalez Battle
L'auteur
Né à Shanghai en 1953, Qiu Xiaolong émigre aux États-Unis après les événements de Tian'anmen. Également en Points :
Visa pour Shanghai et Encres de Chine.
Voilà un polar que j'ai mis du temps à me décider à lire malgré les avis généralement positifs et bien qu'il fasse
partie de mes challenges depuis l'année dernière. J'avais en réalité des a priori, je craignais de m'ennuyer dans une histoire de meurtre clairement politique, avec ses clichés et ses
évidences, tendant la perche à des discours et considérations sur le communisme qui me parleraient peu, voire pas du tout, et je craignais aussi un style un peu vieillot, traditionnel, un peu
trop chinois, que j'imaginais mal adapté aux polars.
Erreur, j'ai été étonnée par le côté très moderne, occidental, qui se dégageait de l'écriture de ce roman, jusqu'à
ce que je me rende compte qu'en fait ce livre a été traduit de l'anglais et donc que l'auteur n'était pas un Chinois à 100 %. Enfin, si, mais bon, bien qu'il ait grandi et vécu en Chine, son
statut d'expatrié aux États-Unis fait qu'il a tout de même une approche plus libre et décontractée quand il s'agit de pointer du doigt les failles du système dans son pays, et qu'il a une façon
de voir les choses beaucoup plus occidentale que chinoise, ce qui se ressent assez à la lecture de son roman.
Ça n'empêche que ce polar est très intéressant et instructif sur la Chine socialiste en transition vers la fin des
années 80. L'auteur brosse une peinture politique et sociale de la Chine des années 60 au début des années 90 et s'attache beaucoup au quotidien de ses personnages, s'attardant sur leurs
habitudes sociales et leur train-train quotidien.
Vraiment j'ai appris bien des choses que je ne soupçonnais pas sur le mode de vie des Chinois, sur leurs relations
entre eux, professionnelles ou amicales, sur leurs difficultés également (la crise du logement y est particulièrement déprimante), sur leurs habitudes alimentaires (qu'est-ce qu'on se goinfre
dans ce livre, et qu'est-ce que ça donne envie !).
Ce roman a été pour moi un véritable voyage culturel qui a provoqué chez moi à la fois choc et émerveillement au gré
des pages.
Bien sûr, on n'échappe pas aux considérations politiques que je craignais tant (de ne pas suivre surtout), mais ça
se fond très bien dans l'enquête que l'auteur développe tout en finesse et avec clareté, et ça se révèle être aussi particulièrement intéressant, même si pour le coup, on n'apprend rien de
véritablement neuf, et que le déroulement des événements sur la fin m'a semblée peut-être un peu 'facile'.
Par contre, j'ai été un peu soulée par le côté 'poète' de l'inspecteur et par sa pseudo histoire sentimentale avec
la journaliste. Poète, romantique et idéaliste, forcément notre inspecteur ne pouvait pas être un flic ordinaire, et en plus il traduit des romans policiers occidentaux !
À croire que l'auteur l'a un peu façonné à son image...
Un passage que j'ai bien aimé car assez révélateur culturellement parlant :
« - En fait, 'intimité' est un mot difficile à traduire en chinois.
Il s'y était heurté plusieurs fois. Il n'y avait pas de mot équivalent dans sa langue. Il avait dû trouver une
périphrase pour en exprimer le sens. »
Lu dans le cadre du deuxième tour du défi Littérature policière sur les 5 continents.
(DAL 2 - 7) DÉFI ACHEVÉ !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! Youhou !
Cette chronique de lecture est originellement parue le 24 octobre 2010 dans Lecture sans frontières, blog sur lequel vous pouvez lire d'autres articles
d'A Girl from Earth.