Tokyo, de Mo Hayder
Pocket, février 2007, 473 pages, ISBN 978-2-266157902
Le problème quand on attend impatiemment de lire un livre depuis un moment déjà c'est qu'on peut être
déçu.
Il serait injuste de dire que Tokyo est nul ou même seulement moyen, c'est juste qu'il me manquait un tout petit
quelque chose qui fait que je n'ai pas vraiment accroché.
Pourtant l'histoire est séduisante : une jeune femme dont on ignore pratiquement tout (si ce n'est qu'elle se fait
appeler Grey) abandonne tout pour se rendre à Tokyo afin d'obtenir une vidéo extrêmement rare sur les massacres de Nankin, détenu par un vieil universitaire chinois qui se trouve dans l'archipel
pour des recherches sociologiques...
Période méconnue des Occidentaux – et de bon nombre de Japonais – pendant laquelle les militaires nippons ont
exterminé près de 300 000 personnes, et se sont livrés à des actes de torture
« En quelques semaines à peine jusqu'à trois-cent mille civils furent massacrés. Quand elle eut fini, dit-on, il
n'était plus nécessaire de prendre le bateau pour passer d'une rive à l'autre du Yang-Tsé. Il n'y avait qu'à marcher sur les cadavres. Les Japonais firent preuve d'une grande créativité en ce qui
concernait les façons de tuer. Ils enterrèrent des jeunes gens jusqu'au cou dans le sable et passèrent dessus avec leurs chars. Ils violèrent des femmes âgées, des enfants, des animaux. Ils
décapitèrent, démembrèrent et torturèrent ; ils s'exerçaient à la baïonnette sur des nourrissons. »
et même de sinistres expériences défiant l'entendement, notamment la tristement célèbre unité 731, qui se livrait à
des expériences de vivisection humaine...
Et c'est peut-être là le problème : j'ai lu l'ouvrage avec une perspective historique inconsciente alors qu'il
s’agit d'un thriller. Thriller assez bien construit par ailleurs, qui distille avec parcimonie les indices, ce qui pousse à poursuivre la lecture pour satisfaire notre curiosité régulièrement
titillée. Ainsi, le personnage de Grey qui se dessine lentement et qui prend de la profondeur, au fur et à mesure des pages. Dès le début, on la sait torturé et mal dans sa peau, mais pourquoi
donc ? Elle a eu une enfance inhabituelle certes, mais qu'est-ce qui l'a tant marquée qu'elle se méfie à ce point du regard des hommes ? Quel est ce terrible secret ?
J'ai dit thriller assez bien construit ? J'aurais dû dire vraiment bien construit, car même si très vite on devine
le coupable, on se rend compte que ce n'est pas ce qui prime réellement. Non, le plus est important c'est de savoir quel est ce remède miracle qui donnerait sinon l'immortalité, du moins
prolongerait la vie d'un vieux yakuza (eh oui, qui dit Japon dit forcément Yakuza...). Remède que Grey doit rapporter au vieil universitaire si elle veut visionner la vidéo...
Bref, je ne déconseille pas non plus la lecture, mais du coup, je me suis dit que je ferais bien de me plonger dans
Le viol de Nankin, d'Iris CHANG, qui est cité comme source, depuis le temps qu'il me fait les yeux doux à la librairie...
En attendant, je n'ai toujours pas terminé le défi Littérature policière sur les 5 continents. Serais-je dans les temps cette année ?
Cette chronique de lecture est originellement parue le 17 décembre 2010 dans iti1801, blog sur lequel vous pouvez lire d'autres articles d'iti.