Le temple de la grue écarlate, de Tran-Nhut
Une enquête du mandarin Tân
Philippe Picquier (poche), 2001, 375 pages, ISBN 978-2877305587
Présentation de l'éditeur
Lorsqu'il rejoint son poste, aux confins de l'empire vietnamien du XVIIe siècle, le mandarin Tân ne sait pas encore
que les familles de notables n'ont qu'une idée en tête : le marier à leurs filles nubiles. Cependant le jeune homme n'a guère le temps de se prêter à ces jeux sociaux, car il se voit bientôt
confronté à sa première affaire de magistrat. Une succession de meurtres aussi cruels qu'inexplicables le conduit à s'intéresser de près à un ordre de moines plus férus d'arts martiaux que
soucieux de la loi de Bouddha. Aidé de son ami le lettré Dinh, il lui faudra parcourir les montagnes embrumées du Nord et déployer toute son ingéniosité pour mener à bout son enquête, dont la
solution au goût amer est un défi à son sens inné de la justice.
Quand il s'agit de créer l'étoffe d'une histoire, quatre mains peuvent tisser une trame plus élaborée que deux.
C'est en s'inspirant de leur aïeul maternel que les sœurs Tran-Nhut - l'une est physicienne, l'autre ingénieur d'une grande université américaine - ont imaginé le personnage du mandarin
Tân, en convoquant les mille et un détails d'un passé révolu et de ses légendes, avec un évident plaisir d'écriture.
Mon avis
J'ai lu ce roman dans le cadre du défi Littérature
policière sur les 5 continents. Je ne connaissais nullement ce duo d'écrivaines mais partais avec un a priori positif car le récit se déroule au XVIIe siècle et j'apprécie beaucoup me
retrouver plongée dans une époque antérieure à la nôtre.
J'ai pourtant été déçue, non pas par l'écriture qui est pleine de saveur et très imagée : « Leurs comparses se
ruèrent à l'assaut, la gueule ouverte, mais le mandarin s'était replié sur lui-même, et exécutant le geste parfait de la Grenouille Ailée, s'éleva dans les airs, par-dessus leurs figures ahuries.
[...] Quand Dinh ouvrit les yeux, il vit un pied puant arriver à grande allure. Par réflexe, il se laissa tomber sur le flanc, ce qui lui évita d'avoir le nez cassé. Le brigand qui l'avait
manqué proféra un juron et voulut le frapper au crâne en exécutant la figure connue de la Vieille qui Bat le Grain. Mais ayant pris des appuis trop écartés, il laissa Dinh lui passer entre les
jambes. Celui-ci se redressa et à l'aide de la technique peu élégante de l'Âne qui Rue, atteignit les parties tendres de son agresseur qui s'écroula en hurlant. »
La déception vient en fait de l'action qui manque, à mon sens, de rythme, surtout durant la première moitié du
roman. Bien sûr, le mandarin Tân se voit dès son arrivée dans sa nouvelle fonction confronté à des assassinats particulièrement horribles d'enfants extrêmement difformes, les Rejets de l'Arbre
Nain. Mais durant une bonne partie du récit, j'ai eu l'impression que cette enquête s'enlisait quelque peu, elle passait à l'arrière-plan d'une narration faisant alors la part belle à la
description d'un lieu et d'une époque, ce qui aurait pu ne pas être dérangeant si l'enquête avait été parallèlement poursuivie. Or, elle semble presque à l'arrêt avant de redémarrer.
La personnalité du mandarin, à la bonhomie apparente, m'a en revanche bien plu, tout comme les relations
privilégiées qu'il entretient avec son entourage et particulièrement son ami Dinh.
Bref, nul regret d'avoir lu ce livre mais je ne partirai probablement pas à la découverte d'autres aventures de
Tân...
Cette chronique de lecture est originellement parue le 3 octobre dans Le monde de Paikanne, blog sur lequel vous pouvez lire
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