12 avril 2009
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La parution du Banquet de la licorne, septième volume des aventures du Mandarin Tân créé par les sœurs Tran-Nhut est l'occasion de revenir sur
cette série. D'autant que cet épisode n'est pas mon préféré, et de loin, et que je ne voudrais pas que vous passiez à côté d'une excellente série.
Le Mandarin Tân a décidé d'accueillir dignement le nouveau collecteur d'impôts. Alors qu'au dehors l'orage gronde, les notables de la petite ville se rassemblent pour le festin. Le confort de la
salle du banquet, l'alcool, les mets les plus raffinés à profusion, tout est rassemblé pour délier les langues et ouvrir les esprits. Chacun y va de son histoire, mettant à l'épreuve la sagacité
bien connue de Tân. Peu à peu, les secrets tombent et les mystères se dévoilent...
C'est un grand classique du roman à énigmes : des conteurs, des mystères, un « trouveur »... Les nouvelles se suivent et ne se ressemblent pas. Certaines sont très réussies, et arrivent à toucher
le lecteur par leur poésie, leur noirceur, ou leur peinture d'un pays et d'une époque qu'il connaît très mal. Ce sont celles qui ressemblent le moins justement... à des énigmes. Les quelques
récits de pure « déduction », outre que le lecteur comprend très vite de quoi il retourne (et se demande d'ailleurs comment le protagoniste a pu mettre autant de temps à comprendre...), sont
beaucoup moins prenants. Ce n'est donc pas le meilleur de la série, même si, en bonne cuisinière, Than-Van Tran-Nhut soigne particulièrement le liant, la sauce qui relie toutes ses histoires,
avec en particulier une description très sensuelle du banquet (on finit le recueil affamé), et un final étonnant qui pimente l'ensemble.
La série
a donc débuté avec Le temple de la grue écarlate. Nous sommes au 17e siècle au Viêtnam. Tân, nouvellement issu des concours administratifs de l'Empire, débarque dans la Province de Haute
Lumière dont il devient le Mandarin civil, première autorité de la région, chargé, entre autres, de rendre justice. Dès son arrivée, il est confronté à une affaire qui divise les hommes influents
de la région : le temple de la grue écarlate et ses bonzes guerriers, que certains veulent rénover et aider, que d'autres veulent détruire. Dans le même temps, on retrouve sur un chemin le corps
mutilé d'un garçon de 10 ans, qui faisait partie d'enfants handicapés protégés par les bonzes et logés dans le fameux temple. L'intérêt des moines est-il seulement humanitaire, où utilisent-ils
ces enfants à des fins inavouables ? Pourquoi tuer de façon aussi horrible ces pauvres gamins ? Quels sont les intérêts, et les vilains secrets qui se cachent derrière les différentes factions de
la région ? C'est tout cela que le jeune mandarin, aidé de son ami le Lettré Dinh devra élucider, entre deux invitations à des banquets gargantuesques, et en évitant soigneusement toutes les
jeunes filles à marier qu'on lui met dans les pattes.
On pouvait craindre, à la sortie de ce premier volume, une nouvelle série exotico-historique où un décor vaguement exotique (et/ou historique) tient lieu de seul et unique intérêt. Il n'en fut
rien, on avait là le début d'une vraie bonne série de vraie littérature noire et truculente comme on l'aime. D'une part, l'intrigue est parfaitement menée. Ensuite le lecteur se plonge, sans
aucune difficulté, dans un monde qui lui est totalement étranger, et referme le bouquin en ayant appris quelque chose. Mais surtout quelle jubilation, quelle pêche, c'est du grand spectacle en
cinérama. Ça vit là-dedans, on bouffe, on rigole, on se castagne, on baise, on hait, on trafique, on complote, avec une vitalité, et un humour extraordinaires. Le lecteur en prend plein les yeux,
plein le nez, plein les oreilles, plein les papilles. On s'instruit en s'amusant...
Par la suite les titres, l'un après l'autre, confirment ce
départ en fanfare. En voici deux : L'esprit de la renarde, pour ses résonances modernes et Les travers du Docteur Porc qui est sans doute le plus drôle.
De retour vers le Nord, le Mandarin Tân et le Lettré Dinh s’arrêtent dans le port de Faifo où tous les voyageurs et toutes les cultures se croisent. Le Lettré compte bien profiter de l'intense
vie culturelle de ce lieu de métissage, alors que Tân est pressé de revenir au Nord et de quitter ce Sud qui respecte de moins en moins l'autorité de l'Empereur. Malheureusement, le
deuxième soir, Dinh se fait piéger et jeter en prison. Tân demande alors à monsieur Canh, le seul fonctionnaire honnête du tribunal, de lui permettre d'enquêter pour essayer d'innocenter son ami.
Il apprend à l'occasion que depuis plus d'un an, un cannibale sévit dans la région. Il a déjà mangé quatre adolescents, et vient de faire de même avec quatre mamies, dont il a envoyé les mains et
les pieds au tribunal avec un mot sarcastique signé : Le Gourmet.
Les scènes d’action sont toujours réussies, et l'écriture sensuelle et imagée rend particulièrement bien les scènes gastronomiques et érotiques. Derrière une construction sans reproche, c'est le
plaisir et la jubilation qui restent les sensations dominantes de cette cinquième aventure de Tân, jusqu'au final qui introduit une note plus grave. En effet le constat est sombre, la période
décrite très troublée et annonciatrice de drames. Et surtout, la fin du roman est poignante dans sa violente charge contre une société qui écrase sans pitié ceux qui sont différents. Poignante et
très actuelle. Ce qui, malgré les nombreuses fois où l'on sourit, laisse une impression de lecture très sombre.
Changement de ton avec Les travers du Docteur Porc qui se situe d'emblée dans le registre de la farce. Le Mandarin Tân a quitté sa province, laissant les affaires du tribunal aux
mains du Docteur Porc. Celui-ci est plus préoccupé par l'agrandissement de son cabinet que par l'administration de la justice, jusqu'à ce qu’il soit mis face à un mystère qui titille son
intelligence... et son amour-propre. Un squelette, tout propre, a été trouvé dans une grotte aux abords de la ville, et l'apothicaire Lâm a tenté de soudoyer l'aide du bon docteur pour truquer
les analyses sur les os. Tenter de tromper le Docteur Porc ! Quelle outrecuidance ! Les coupables vont s'en repentir.
Avec ce titre que ne renierait pas Maître Jean-Hugue Oppel en personne, un personnage central haut en couleurs et en odeurs (son haleine est une de ses armes les plus redoutables), des situations
de vaudeville traitées sur le mode de la comedia dell arte... ce roman est très certainement le plus picaresque de la série. Loin de la noirceur de L'esprit de la renarde. Ici on ne tremble pas,
on rit, on se moque des travers des différents personnages, pour s'apercevoir que la nature humaine n'a guère changé en quelques siècles. Au passage on apprend également énormément de choses
passionnantes sur les médecines du XVIIe siècle.
En résumé, une série basée sur des personnages « bigger than life », une écriture qui ne recule devant aucun excès, des intrigues qui tiennent la route, énormément d'informations, fort élégamment
distillées sur ce Viêtnam du XVIIe dans toutes ses dimensions, religieuses, sociologiques, historiques, scientifiques, humaines, gastronomiques... Que demander de plus ?
Bibliographie : Les deux premiers volumes ont été écrits à quatre mains par les deux sœurs. Le troisième fut écrit par Than-Van, sur un scénario commun. C'est elle qui a ensuite écrit
seule les volumes suivants. Pour en savoir plus sur le Mandarin Tân et ses auteurs, c'est là.
Than-Van et Kim Tran-Nhut / Le temple de la grue écarlate, Philippe Picquier (1999) ; L'ombre du prince, Philippe Picquier (2000) ; La poudre noire de maître Hou, Philippe Picquier
(2001) ; L'aile d'airain, Philippe Picquier (2003) ; L'esprit de la renarde, Philippe Picquier (2005) ; Les travers du Docteur Porc, Philippe Picquier (2007) ; Le banquet de la licorne, Philippe
Picquier (2009).
Cette chronique de lecture est originellement parue le 30 mars dans Actu du noir, blog sur lequel vous pouvez
lire d'autres articles de Jean-Marc.
Publié par Jean-Marc
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Asie
9 avril 2009
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Out de Natsuo Kirino
Points Thriller, juin 2007, 672 pages, 9782757804810
Présentation de l'éditeur
« Toutes les nuits, quatre femmes - Masako, Yoshié, Kuniko et Yayoi - remplissent des paniers-repas dans une usine de Tôkyô. Différentes, elles le sont, mais elles ont un point commun : qu'ils
boivent, les trompent, les battent ou les abandonnent, leurs maris les traitent comme des objets sans intérêt maintenant qu'elles ont vieilli. Toutes vivent le malheur d'être femmes dans un pays
qui leur reconnaît peu de droits. Un jour, ce qui devait arriver arrive : l'une d'entre elles, Yayoi, finit par étrangler son mari, Kenji. Pendant ce temps, l'ex-nervi Mitsuyoshi Sataké refuse
l'amour d'une de ses entraîneuses. Et se trouve pris dans la spirale d'horreurs qui suit le meurtre de Kenji. Ainsi est lancée la dynamique terrifiante qui verra ces cinq personnages s'affronter
dans une lutte à mort pour la liberté, l'amour, le pouvoir et l'argent. »
L'auteur
Née en 1951 et auteur de Disparitions, Natsuo Kirino a remporté avec Out le Grand Prix du policier au Japon. Best-seller au pays du Soleil-Levant, Out s'est vendu à
plus de 500 000 exemplaires.
Assez habituée maintenant et bonne cliente de l'ambiance énigmatique et un poil déroutante des romans japonais, je n'ai pas été en reste avec cette intrigue élaborée par la première romancière
japonaise que je lis, Natsuo Kirino.
Plus thriller psychologico-social que polar pur et dur, ce roman dresse le portrait de quatre femmes japonaises entre 30 et 50 ans qui sembleraient incarner certaines réalités de la condition
féminine au Japon. J'ai trouvé cet aspect intéressant car rarement évoqué de façon aussi flagrante. Peu considérées, surtout à mesure qu'elles prennent de l'âge, les Japonaises subissent le joug
de la domination des hommes, indifférents à leur sort de femmes blessées. La haine des hommes et l'amertume liée au sentiment d'être prisonnières d'une spirale sans issue alimentent leur
quotidien sans qu'elles n'en laissent rien vraiment paraître.
Rien de plaintif ou de revanchard dans cette écriture pourtant, l'auteure rebondit sur cette réalité pour développer une intrigue peu banale où quatre collègues de travail se retrouvent
embarquées malgré elles dans un tourbillon d'événements qui commencent par le meurtre du mari de l'une d'entre elles par cette dernière. Motivées par l'appât du gain ou pour des raisons plus
obscures, les trois autres se retrouvent impliquées dans la disparition de son corps.
Se greffe à cette histoire, celle d'un gérant d'un établissement de jeu, profondément psychopathe dégénéré que l'on va accuser de ce meurtre et qui va tout faire pour mettre la main sur les
coupables.
Avec une efficacité redoutable, sans pourtant déployer les grands moyens littéraires, Natsuo Kirino retient notre attention tout au long du récit en nous attachant à ses personnages dont elle
dresse un portrait psychologique précis et soigné, d'un réalisme saisissant et convaincant. Je visualisais particulièrement bien la superficielle Kuniko qui m'a beaucoup amusée et Yoshié, l'aînée
des quatre, dont l'histoire difficile avec sa belle-mère et ses filles m'a particulièrement marquée. J'ai beaucoup aimé la façon dont les rapports entre ces quatre femmes très différentes les
unes des autres ont évolué au cours du récit, l'histoire progresse sans à-coup et de façon très crédible autour de toute une galerie de personnages très divers, c'est particulièrement
appréciable.
Étonnant aussi la façon dont Natsuo Kirino décrit les scènes d'horreur. C'est cru et sans détour, on en fermerait presque les yeux, et pourtant, c'est sans emphase, avec une simplicité dans le
choix des mots et un naturel déroutant, qu'elle en parle.
Un autre aspect de cette histoire que j'ai trouvé très intéressant aussi, c'est celui des Brésiliens d'origine japonaise dont l'auteure aborde le thème dans ce roman. Encore une fois, c'est un
sujet dont je n'ai jamais rien lu dans les romans japonais, et au travers d'un employé de l'usine où travaillent nos quatre femmes, l'auteure développe cette autre thématique sociale de façon
très éclairante. J'ai beaucoup aimé l'histoire de cet homme d'ailleurs qui m'a beaucoup touchée.
C'est un roman vraiment très riche et instructif culturellement parlant sous des dehors de thriller ordinaire.
Ordinaire ? Ben en fait, pas tant que ça... !
Je trouve ça étrange de dire ça d'un thriller, en particulier aussi sanglant, mais j'ai envie de dire que c'est, bizarrement, une belle histoire, dont plusieurs personnages et événements m'ont
beaucoup touchée. La fin me paraît un peu fantasque mais elle se tient et participe aussi à mon sentiment de « belle histoire ».
Cette chronique de lecture est originellement parue le 29 mars dans Lecture sans frontières, blog
sur lequel vous pouvez lire d'autres articles d'A Girl from Earth.
Publié par A Girl from Earth
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Asie
20 mars 2009
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Crime de sang / He Jiahong
Éditions de l'Aube, 395 p., ISBN 978-2752600783
J'aime l'ambiance calme des romans chinois.
Comme une rivière, l'enquête suit son cours à son propre rythme.
Alors, ne soyez pas surpris d'assister à une partie de chasse, à quelques danses, à la visite de fantômes, etc.
Ah oui, j'allais oublier de parler de l'histoire.
Maître Hong, nouvellement installé comme avocat à Pékin, reçoit la visite d'un homme dont le frère est en prison depuis dix ans pour le meurtre d'une jeune femme. Mais est-ce lui le véritable
coupable ? ...
Cette chronique de lecture est originellement parue le 16 mars sur Bookcrossing, site sur lequel vous pouvez lire
d'autres articles de Bilbi, ainsi que sur son blog Livres, etc.
Publié par Bilbi
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Asie
17 mars 2009
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Une carte pour l'enfer, Miyabe Miyuki
Titre original : Kasha
Traduit du japonais par Tanaka Chiharu et Aude Fieshi
Éditions Philippe Picquier, 333 pages
Résumé
Honma Shunsuke, inspecteur de police à Tôkyô, élève seul son fils depuis le décès accidentel, trois ans plus tôt, de son épouse Chizuko. Il se fait aider pour les tâches quotidiennes par un
voisin et ami, qui suite à un licenciement, s'est reconverti en homme de ménage.
Alors qu'il est en convalescence suite à une blessure professionnelle, Honma est contacté par un cousin éloigné de Chizuko. Le jeune homme, brillant banquier, demande à Honma d'enquêter sur
la disparition subite de sa fiancée. Il apparaît vite que la jeune femme, fichée sur la liste des personnes insolvables, a un passé plus que trouble et ne serait peut-être pas celle qu'elle
prétendait être...
Mon avis
J'ai littéralement DÉ-VO-RÉ ce roman policier. Je l'ai lu en deux jours. L'intrigue m'a tenue en haleine jusqu'au bout : au fur et à mesure que l'évidence prenait corps, d'autres éléments
restaient à éclaircir, j'ai trouvé le déroulement très bien mené et je suis restée captivée jusqu'à la fin... qui est un peu inhabituelle par rapport à ce que je connais en matière de thriller,
mais je ne vous en dirai pas plus à ce sujet ;-) ... On suit donc pas à pas l'inspecteur Honma, auquel je me suis très vite attachée. C'est un personnage pondéré, calme et rassurant auquel la vie
a infligé des épreuves, ce qui le rend humain et proche de nous. Il essaie de se reconstruire tant physiquement que moralement suite au décès de sa femme et à sa blessure. Tout en suivant
l'enquête, on pénètre régulièrement dans son quotidien, son foyer où grandit son fils, sous l'oeil et la protection bienveillante du voisin, qui fait aussi office de Nounou quand Honma est
absent. Ce foyer exclusivement masculin est paisible et douillet, un refuge vis-à-vis du milieu professionnel de Honma et des côtés noirs de l'enquête.
Ce thriller aborde le problème du surendettement, qui apparemment est devenu un problème crucial au Japon. J'ai apprécié que l'auteure, par le biais d'Honma, prenne le temps d'analyser et de
réfléchir à ce problème. Elle nous montre bien comment une personne peut se retrouver facilement piégée, recourir à des organismes de crédits de moins en moins « officiels » pour tenter de
rembourser ses dettes, et finalement être entraînée dans une spirale infernale qui conduit à la déchéance sociale, voire à la criminalité.
Un thriller dépaysant, didactique et émouvant, que je classe dans mes coups de coeur.
À propos de l'auteur
Née à Tôkyô en 1960, Miyabe Miyuki a rapidement conquis le public du roman policier japonais. Une carte pour l'enfer a obtenu en 1992 le prix Yamamoto, le Goncourt du genre. Du même auteur
a déjà paru aux éditions Philippe Picquier La librairie Tanabe.
(source : quatrième de couverture)
Cette chronique de lecture est originellement parue le 5 mars dans Soie dit en passant..., blog sur
lequel vous pouvez lire d'autres articles de Soie.
Publié par Soie
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Asie
5 mars 2009
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Le temple de la grue écarlate (Une enquête du mandarin Tân, 7)
Philippe Picquier, février 1999, poche, septembre 2001, 376 pages
Présentation de l'éditeur
« Lorsqu'il rejoint son poste, aux confins de l'empire vietnamien du XVIIe siècle, le mandarin Tân ne sait pas encore que les familles de notables n'ont qu'une idée en tête : le marier à leurs
filles nubiles.
Cependant le jeune homme n'a guère le temps de se prêter à ces jeux sociaux, car il se voit bientôt confronté à sa première affaire de magistrat.
Une succession de meurtres aussi cruels qu'inexplicables le conduit à s'intéresser de près à un ordre de moines plus férus d'arts martiaux que soucieux de la loi de Bouddha.
Aidé de son ami le lettré Dinh, il lui faudra parcourir les montagnes embrumées du Nord et déployer toute son ingéniosité pour mener à bout son enquête, dont la solution au goût amer est un défi
à son sens inné de la justice. »
Premier coup fatal de ma participation au défi Littérature policière sur les 5 continents !
Voilà que je me suis embarquée aux confins de l'empire vietnamien du XVIIè siècle avec ce premier volume des enquêtes du mandarin Tân, lecture pour le moins imprévue car elle ne fait pas partie
de ma sélection pour ce challenge, ce qui ne l'a pas empêchée de s'insérer sournoisement dans ma PAL quand Jean-Marc Laherrère me l'a recommandé pour représenter l'Asie dans ma liste et que d'autres participants en parlaient avec enthousiasme : Viêtnam, humour, enquête, il n'en fallait
pas plus pour me convaincre de découvrir cette série !
J'étais particulièrement intriguée par cette série exotico-historique dont j'anticipais une lecture captivante et amusante, aussi quelle ne fut ma déconvenue quand j'ai constaté au bout de
quelques pages que je ne rentrais pas du tout dans le récit !
C'est le style qui ne me plaît pas au début, une écriture qui me gêne dans le récit, un rien trop raffinée, trop étoffée, trop élaborée, à mon goût, puis les personnages, trop caricaturaux, trop
prévisibles dans leurs actes et paroles, je peine à m'attacher à eux, et enfin l'intrigue qui tourne autour de meurtres d'enfants monstrueux et de bonzes férus d'arts martiaux, et qui me laisse
de marbre...
C'est mal parti pour moi donc mais comme ça se laisse lire, je continue, mais sans grand enthousiasme. Je trouve ça léger, divertissant mais sans plus...
Jusqu'à la moitié du roman où là le déclic se fait, je me réveille de ma torpeur et je commence à être sérieusement intriguée par l'affaire en cours ! C'est qu'elle a pris une proportion telle
qu'il est impossible, arrivé à ce stade, de ne pas se poser mille questions sur ce qui se passe et de refermer le livre sans avoir le fin mot de l'histoire.
L'intrigue est un peu longue à se mettre en place au début mais on finit par se prendre au jeu de la résolution des différents mystères qui hantent l'histoire, et même à apprécier la saveur
épicée du récit.
Je commence à véritablement prendre goût à la plume des soeurs Tran-Nhut dont la richesse et la précision du vocabulaire m'impressionnent en réalité. Leur érudition et leurs connaissances dans
des domaines vraiment très variés me fascinent, et quand elles abordent le thème de la nourriture, mes papilles sont en extase ! Maintenant que je suis plus familiarisée avec nos
personnages principaux, c'est avec grand plaisir que je les suis dans leurs aventures.
Quant à l'humour, je le qualifierais d'humour espiègle où l'on sourit plus qu'on ne rit mais on a droit à quelques situations cocasses qui égayent efficacement le récit et j'étais
particulièrement pliée dans la description délirante des techniques martiales où on a l'impression que les soeurs Tran-Nhut se lâchent complètement. J'ai noté entre autres « la prise du Cochon
qu'on immole » que je n'ai pu m'empêcher de visualiser et je trouve ça tordant, « le mouvement de la Danseuse lubrique » et « le geste de la Banane qui roule » !
Au final, je suis plutôt satisfaite de cette découverte, j'ai trouvé l'intrigue vraiment finement et habilement menée même si j'ai mis du temps à rentrer dedans, et c'est un récit culturellement
très instructif sur le Viêtnam du XVIIè siècle, cet aspect du roman m'a beaucoup plu aussi.
Je pense donc poursuivre ma lecture de cette série prochainement. Ce tome étant par ailleurs plus ou moins introductif, les volumes suivants n'en devraient être que meilleurs !
Les auteurs
Les sœurs Tran-Nhut sont nées au Viêtnam en 1962 pour Thanh-Van, en 1963 pour Kim. En 1968, elles s'installent aux États-Unis avec leurs parents. Trois ans plus tard, elles arrivent en France où
elles feront le reste de leurs études. Thanh-Van repart aux États-Unis début 1980 pour revenir en France quelques années plus tard avec un diplôme d'ingénieur en mécanique du California Institute
of Technology.
C'est en 1999 qu'elles se lancent dans l'écriture à quatre mains. De ces séances est issu le mandarin Tân, jeune magistrat d’un Viêtnam historique. Une « figure mythique de la famille », leur
arrière-grand-père maternel, reconnu pour avoir accédé très jeune aux fonctions de mandarin, servira de modèle au héros du roman. Le temple de la grue écarlate sera publié aux éditions Philippe
Picquier la même année.
En 2002, Thanh-Van part pour un voyage autour du monde qui la mènera du Kenya aux glaciers de l'Alaska.
Depuis 2003, Thanh-Van continue seule la série des enquêtes du mandarin Tân. De son côté, Kim s'est lancée dans le polar d'aventure pour adolescents.
Source: Wikipédia
Cette chronique de lecture est originellement parue le 11 février dans Lecture sans frontières,
blog sur lequel vous pouvez lire d'autres articles d'A Girl from Earth.
Publié par A Girl from Earth
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Asie
25 février 2009
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05:47
Le premier livre que j'ai lu pour le défi est L'aile d'airain (Une enquête du mandarin Tân, 4) de Tran-Nhut. C'est le premier livre que je lis
de cette auteure et aussi le premier du Viêt-Nam, même si Tran-Nhut est arrivée en France très jeune et je ne suis pas si sûre si c'est bien de la considérer comme une écrivaine d'Asie.
Les histoires du mandarin Tân se déroulent au Viêtn-Nam au XVIème siècle et pour moi, c'est la chose la plus intéressante, car on connaît le pays, ses traditions, ses coutumes, son histoire, mais
il faut dire que c'est aussi un véritable polar, avec meurtres et enquêtes.
Tân et son ami, le lettré Dinh, vivent au Nord du Viêt-Nam mais descendent au Sud pour visiter le village de Tân qu'il a quitté depuis plusieurs années. Ils pensent retrouver un paisible petit
village avec des gens tranquilles et aimables mais en fait ils découvrent que la méchancheté y trouve sa place et les meurtres ne manquent ni dans le présent ni dans le passé.
Les deux amis sont bien décrits et aussi tous les autres personnages sont bien vivants, même lorsqu'ils ne sont pas importants pour l'enquête, comme le petit Bao, sa mère Hirondelle, le vendeur
d'herbes... Ce qui est très vivant aussi, c'est la nature du Sud Viêt-Nam, surtout les animaux et les oiseaux.
On arrive à la résolution seulement à la fin, et c'est important pour un polar :-)) même si les indices n'y sont pas cachés. En conclusion, j'aime ce livre mais pas « passionnément ». En tout cas
si je trouve d'autres enquêtes du mandarin Tân (celui-là, je l'ai emprunté dans une autre bibliothèque que la mienne), je vais les lire.
[Gaspara n'a pas de blog mais une deuxième chronique de lecture va être publiée
prochainement.]
Publié par Gaspara
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Asie
18 février 2009
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05:58
Visa pour Shanghai - 2 étoiles
Avant-goût
Poète mais avant tout inspecteur principal et étoile montante de la police de Shanghai, Chen se voit confier une mission de la plus haute importance politique, il doit, avec l'aide de la jolie
inspectrice fédérale américaine Rohn, retrouver la trace de Wen et la ramener absolument aux États-Unis. Mais les triades chinoises et la police chinoise locale font tout pour leur mettre des
bâtons dans les roues...
Critique
Cette enquête a un fort parfum de Chine, on découvre avec plaisir de multiples proverbes chinois ainsi que de nombreux poèmes. Ce qui donne à cette enquête une certaine dose de romantisme
entretenu par les relations complexes entre l'inspecteur principal Chen et l'inspecteur Rohn. Par ailleurs, au gré des voyages à l'intérieur du pays, on en apprend un maximum sur les triades, sur
la nourriture typique, sur les distractions des chinois ainsi que tout ce qui concerne la politique du pays. C'est-à-dire le contrôle des naissances, la révolution culturelle, la rééducation des
"jeunes instruits", l'influence qu'a eu Mao, etc. Ces éléments font que cette lecture est très enrichissante sur la Chine mais là où le bat blesse, c'est au niveau de l'intrigue. Celle-ci passe
finalement au second plan, elle reste relativement compliquée et pas vraiment passionnante, sentiment renforcé par l'absence de rythme. Vraiment dommage.
Malgré un contexte très instructif, l'intrigue n'est pas à la hauteur, c'est une vraie déception de ce côté-là.
Encres de Chine - 4 étoiles
Avant-goût
Yue, ancienne garde rouge et auteur d'un ouvrage controversé sur la révolution culturelle, est retrouvée morte dans sa tingzijian dans le shikumen.
L'inspecteur Yu ainsi que l'inspecteur principal Chen enquêtent...
Critique
L'intrigue de Encres de Chine n'est vraiment pas importante et finalement peu exploitée mais elle ne sert que de prétexte à la peinture de la Chine d'hier et d'aujourd'hui que nous propose
Qiu Xiaolong.
En effet la clé de voûte du livre est la Révolution Culturelle avec l'aspect gardes rouges ainsi que la fameuse rééducation des jeunes instruits (en un mot, les étudiants étaient obligés de
retourner à la campagne pour apprendre le dur labeur des champs, la vraie signification du mot travail). Les habitants du shikumen (habitation du XIXeme siècle typique de Shanghaï disposant d'une
cour intérieure où peuvent vivre une dizaine de familles) ont tous une vision différente de cette soi-disante Révolution Culturelle et de son impact négatif sur la société chinoise.
Qiu Xiaolong nous montre aussi cette société en pleine mutation où le socialisme laisse place peu à peu au capitalisme, où les restaurants d'état ne peuvent faire face à la concurrence des
restaurants privés, où tout est fait pour montrer à l'Occident une bonne image de la Chine et éviter à tout prix les scandales politiques, où la crise du logement est impressionnante avec
certaines familles vivant à près d'une demi-douzaine dans une pièce minuscule, et cetera desunt.
Voilà qui nous amène à une autre facette très réussie du livre : les personnages. Tout d'abord Qiu Xiaolong met en avant l'inspecteur Yu et sa femme Peiqin qui souffrent eux aussi de partager une
seule piece avec leur fils Qinqin, ensuite vient l'inspecteur principal Chen qui préfère faire une traduction lucrative pour un nouveau riche et qui voit que grâce à des relations bien placées on
peut tout avoir notamment une jolie secrétaire particulière (une xiaomi) prénommée Nuage Blanc et ainsi être corrompu. D'autre part Chen illustre parfaitement un autre problème chinois : la
difficulté de trouver l'amour dans une ville surpeuplée où finalement la seule consolation réside dans le travail.
Il ne faut pas non plus oublier le personnage du poète Yang, le grand amour de Yue (la femme assassinée) qui nous amène à considérer la dimension poétique du livre. Il faut d'abord savoir que Qiu
Xiaolong a émigré aux États-Unis grâce à ses études, notamment celle sur le poète américain T.S. Eliot, donc il n'est pas étonnant de voir des poèmes tout au long du roman, l'inspecteur principal
Chen étant aussi poète à ses heures perdues. La gastronomie chinoise n'est pas en reste avec de nombreuses incursions dans les restaurants dont les mets sont aussi intriguants qu'alléchants.
Au final Encres de Chine est un excellent roman pour celui qui s'intéresse à la culture chinoise mais décevant pour celui qui cherche là un thriller
palpitant.
Cette chronique de lecture est originellement parue sur Polars addict, blog sur lequel vous
pouvez lire d'autres articles de Clément.
Publié par Clément
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dans
Asie
11 février 2009
3
11
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/2009
05:19
Miyabe Miyuki - La librairie Tanabe
Picquier Poche, 1999
Monsieur Iwa a soixante-cinq ans et, après sa retraite, s'occupe de la librairie
Tanabe qui propose des livres d'occasion. Il est secondé le week-end par Minoru, le fils de son fils.
Tous les deux vont se trouver impliqués dans des enquêtes policières ou des événements mystérieux : la découverte des corps d'une femme et de son enfant décédés il y a des décennies, un fils qui se demande pourquoi son père possède 300 exemplaires du même livre, un enfant maltraité, un auteur de romans policiers dont
l'intrigue est copiée par un assassin et la disparition d'une jeune femme.
En même
temps nous apprenons à connaître mieux Monsieur Iwa, sa famille et ses amis. Le jeune Minoru fréquente une jeune femme qui déplaît à ses parents...
Sympathique petit roman policier, à l'ambiance bien japonaise, aux personnages
attachants, où les intrigues se dénouent tranquillement. Beaucoup de fraîcheur se dégage de cette lecture dépaysante et originale, malgré quelques bugs dans la traduction.
Cette chronique de lecture est originellement parue le 31 janvier dans En lisant en voyageant, blog
sur lequel vous pouvez lire d'autres articles de Keisha.
Publié par Keisha
-
dans
Asie
3 février 2009
2
03
/02
/février
/2009
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Diao Dou, « Solutions »
Traduit du chinois par Véronique Jacquet-Woillez
Titre original : « Solutions »
Éditions : Bleu de Chine
Collection : Chine en poche
2001 pour l'édition originale, 2003 pour la traduction française
126 pages - ISBN : 2-910884-57-0
Couverture : Guo Wei, galerie Loft
Source : ma bibliothèque municipale - Terminé : le 23 janvier 2009
Auteur
Né en 1960 à Shenyang dans la province du Liaoning, dans une famille d'intellectuels, Diao Dou se passionne pour la littérature et le roman à suspens qu'il découvre en lisant « Les gommes »
d'Alain Robbe-Grillet « L'emploi du temps » de Michel Butor, « Si par une nuit d'hiver d'un voyageur » d'Italo Calvino ainsi que nombre de récits de Borges.
Diao Dou est actuellement rédacteur de la revue 'Critique contemporaine'. Diplômé de l'université de radiodiffusion de Pékin, il travaille comme journaliste avant de se consacrer à l'écriture. Il
publie un premier recueil de poèmes, puis il se tourne vers la nouvelle et le roman. Chez le même éditeur sont publiés « La faute », « Jumeaux » (2002), « Nid de coucou », « Rêves ».
Lieu de l'action
Zhangji, cité du Nord
Personnages
Yan Song, un jeune garçon désœuvré
Yi Dan, jeune travailleuse solitaire
Zhong Xiang, ex-cadre brillant plus ou moins en disgrâce
Résumé
Le livre s'ouvre par un extrait d'une note confidentielle faisant état de treize cas répertoriés de « blessures au postérieur » ; trois autres derniers cas montrent que l'agresseur
redouble d’activité.
Le suspect de taille moyenne, masqué, âgé de 30 à 40 ans, ne viole pas ses victimes, ne leur vole pas leur argent mais les menace verbalement avant de les agresser physiquement.
Les victimes sont des femmes seules, de dix-sept à quarante-trois ans.
Le récit qui suit présente en trois chapitres tour à tour les trois protagonistes de l'affaire : trois histoires, trois personnages dont les hasards du destin transforment du jour au lendemain
leur existence grise et monotone.
Yan Song, l'agresseur, jeune homme indolent fait un soir la rencontre d'une femme en train d'uriner et cela lui donne l'idée d'opérations nocturnes qu'il baptise "tatouages". Il se révèle
tout à coup d'une imagination féconde et d'une activité débordante.
Yi Dan, grâce à une collègue, brise la monotonie de sa vie en envoyant quotidiennement des cartes postales menaçantes à un inconnu.
Zhong Xiang trompe son ennui en enquêtant minutieusement sur l'origine de ces mystérieuses cartes postales dont il est le destinataire. Il décide d'assassiner celle qu'il croit en être
responsable, espérant faire endosser ce meurtre à l'auteur des "tatouages".
Le livre se termine par une autre note confidentielle qui offre au récit un dénouement inattendu.
Ressenti
Une ambiance étrange et un thriller plus psychologique qu'à suspens puisqu'on connaît l'agresseur dès le début.
C'est ma 2ème fiche de lecture dans le cadre du défi de littérature policière sur les 5 continents. La première est D'ombre et de lumière, de John Harvey.
Cette chronique de lecture est originellement parue le 29 janvier sur Laura
Vanel-Coytte, blog sur lequel vous pouvez lire d'autres articles de Laura.
Publié par Laura
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dans
Asie
20 janvier 2009
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/2009
10:56
J'ai terminé il y a quelques jours déjà Ryô Hara « Nuit sur la ville ».
Éditions Philippe Picquier (17 juin 2003), 396 pages, collection Picquier poche, ISBN 2-87730-656-9
Je n'ai pas eu la main heureuse sur ce premier choix... Espérons que les autres seront plus attractifs !
Le privé Sawazaki est dans la lignée de Philip Marlowe, sauf qu'il ne boit pas en compagnie et officie à Tôkyô. Son créateur a puisé aux sources des romans noirs américains, dont il décline les
codes avec jubilation. En enquêtant sur la disparition d'un journaliste lié à la richissime famille Sarashina, Sawazaki découvre l'imbrication des affaires et de la politique, et les dessous peu
sains d'une campagne électorale. S'il démêle les fils très embrouillés des chantages, trahisons et mensonges - et de pas mal de meurtres - ce privé désabusé n'a pas la prétention de changer les
règles du jeu : celles d'un monde où les perdants bénéficient rarement d'une deuxième chance et où les puissants s'en sortent - presque - toujours indemnes.
Un journaliste disparaît le jour où il doit signer les papiers de son divorce et recevoir en échange une grosse somme d'argent. L'avocat de la famille charge le détective privé Sawazaki
d'enquêter sur cette disparition. Ce dernier va se retrouver au coeur d'intrigues familiales, politiques et financières.
Bonne cliente de romans policiers, je me laisse emporter par l'histoire mais suis de plus en plus déçue par le côté américain de ce polar japonais. Le privé Sawazaki a tous les travers du
détective américain. D'accord, il ne boit pas de whisky mais fume comme un pompier, conduit une voiture-épave, a sale caractère et beaucoup d'humour (noir), apprécie les jolies femmes
énigmatiques...
Seuls les yakuza (gros bras de la mafia japonaise) nous rappellent qu'on est bien à Tôkyô. C'est d'ailleurs le seul passage que j'ai apprécié dans ce livre. Les échanges entre le privé et les
yakuza venus l'interroger sont excellents et bourrés d'humour.
Mais très vite, l'intrigue n'avance plus... On s'enlise et, au global, Nuit sur la ville est assez soporifique. Je n'ai pas eu le courage d'aller jusqu'au bout (abandonné aux deux tiers).
Ma pile de livres à lire est trop grande pour continuer à avaler des lignes sans prendre du plaisir.
Cette chronique de lecture est originellement parue le 10 janvier dans Valunivers, blog sur
lequel vous pouvez lire d'autres articles de Valérie.
Publié par Valérie
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