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9 octobre 2009 5 09 /10 /octobre /2009 08:43
Le sang de Venise, de Maud Tabachnik
J'ai lu policier, septembre 2003, 282 pages

Commencé ma lecture hier soir... passionnant !
Alors je vous emmène faire une visite dans le Ghetto de Venise.

Avril 1575.
La communauté juive de Venise est en danger.
Le cadavre d'un petit garçon est découvert près du ghetto.
Attisée par un moine franciscain fanatique, naît une odieuse rumeur : cet assassinat serait un crime rituel.
Les Juifs utiliseraient du sang d'enfants chrétiens pour confectionner leurs galettes de Pâques.
Si la rumeur se révéla fondée ou si, simplement, il était avéré qu'un Juif était le meurtrier, cela contraindrait les autorités de la ville à se débarrasser de la communauté tout entière. Or ses activités financières enrichissent considérablement la cité, même si la tolérance de Venise envers les Juifs empoisonne ses relations avec la papauté.
Rachel da Modena vit dans le ghetto. C'est une jeune fille rebelle, courageuse, éprise de liberté, qui n'hésite pas à se mettre en péril, même vis-à-vis des siens, pour débusquer le véritable tueur et innocenter son peuple.

L'accusation de crime rituel à l'encontre des Juifs (hébreu : עלילת דם 'Alilat dam) est l'une des plus anciennes et plus tenaces allégations antijuives et antisémites de l'Histoire.
En effet, bien que l'accusation de crime de sang ait touché d'autres groupes que les Juifs, dont les premiers chrétiens, certains détails, parmi lesquels l'allégation que les Juifs utilisaient du sang humain pour certains de leurs rituels religieux, principalement la confection de pains azymes (matza) lors de la Pâque, leur furent spécifiques.
Walter Laqueur dénombre plus de 150 accusations, et probablement des milliers de rumeurs.

Représentation du meurtre rituel supposé de Simon de Trente dans la Weltchronik d'Hartmann Schedel en 1493
Simon de Trente était un garçon de la ville de Trente, alors dépendante du duc du Tyrol (aujourd'hui en Italie).
Il disparaît dans des conditions mystérieuses aux alentours de la Pâques juive de 1475, donnant lieu a un des procès les plus connus pour accusation de crime rituel dont ont été victimes les Juifs d'Europe à la fin du Moyen-Âge.
La disparition de Simon Unverdorben, connu également sous le nom de Siméon, Simonin ou Simonet, déclencha une accusation de crime rituel.
Ces accusations se multiplièrent à travers l'Europe pendant près de cinq siècles. Peu de temps avant la disparition de l'enfant, Bernardin de Feltre, prêcheur franciscain itinérant, avait prononcé à Trente une série de sermons où il disait du mal de la communauté juive locale.
Le 24 mars 1475, un enfant de deux ans, Simon, disparaît. Immédiatement, la petite communauté juive de Trente est suspectée. L'après-midi même, le père de Simon signale au Podestat de la ville une rumeur qui accuse les Juifs d'enlever et de tuer des enfants chrétiens.
Selon lui, ils avaient vidé l'enfant de son sang pour l'utiliser dans la cuisson de leurs matzot de Pâques, et pour des rituels occultes auxquels ils se livraient secrètement. Le 26 mars, le corps sans vie de l'enfant est retrouvé dans un canal sous la maison du Juif Samuel. Huit Juifs sont immédiatement arrétés, 10 le lendemain.

Accusation de meurtre rituel et exécution des Juifs de Trente
Les chefs de la communauté juive sont arrêtés et soumis à la question, c'est-à-dire à la torture.
Samuel, un préteur sur gage, un des hommes les plus en vue de la petite communauté de Trente, est particulièrement suspecté, car le canal où a été retrouvé le corps du jeune garçon passe sous sa maison.
Il commence par protester de l'innocence de la communauté, en demandant à ses bourreaux : « Où avez-vous appris que le sang des Chrétiens fait du bien et apporte du bien-être ? » mais soumis à des formes toujours plus cruelles de torture, il finit par avouer tout ce qu'on lui demande de répéter.
Ses aveux, emprunts des préjugés chrétiens envers les Juifs, confirment pour les historiens d'aujourd'hui, la preuve de son innocence. Il raconte en effet que les sages de Babylone avaient autrefois délibérés que « le sang d'un enfant chrétien tué de la sorte [c'est à dire lors de Pessah] serait profitable au salut de l'âme ».
Cette phrase qui fait l'analogie entre le sacrifice d'un jeune enfant et la passion du Christ semble tout à fait improbable dans la bouche d'un Juif. Bonaventura de Mohar, un des autres accusés juifs, commence par dire sous la torture « ne pas savoir ce qu'il doit dire » avant de relater de manière fort détaillée, sous la torture toujours plus insistante, tout ce qu'on lui demande de dire.
Pour étayer leurs accusations, les juges de la ville interrogent un juif converti, Giovani da Feltre, alors emprisonné pour des raisons inconnues. Celui-ci, soucieux d'obtenir les bonnes grâces de ses juges, leur donne le récit détaillé d'un crime rituel auquel sont père aurait participé 40 ans plus tôt en Bavière. Il raconte que les Juifs ont l'habitude d'utiliser du sang chrétien aussi bien lors de la Pâque que le lendemain, le mélangeant aussi à du vin.
Un premier procès se tient du 28 mars au 22 juin 1475. Il aboutit à l'exécution de neuf Juifs : sept sont brûlés et deux décapités parce qu'ils s'étaient convertis au christianisme.
Le second procès, entre décembre 1475 et janvier 1476, aboutit à l'exécution de 5 autres Juifs.
Le pape est averti du procès par le duc du Tyrol, lui même alerté par des notables juifs. Il envoie un commissaire apostolique chargé d'enquêter sur la légitimité des procédures suivies. Ce dernier écrit un rapport accablant pour les juges de Trente.
Mais comme l'évêque de la ville a de nombreux appuis dans la curie romaine, le rapport n'est pas pris en compte.

De l'apparition du culte de Saint Simon de Trente à sa disparition en 1965
Sans attendre les résultats du procès, les habitants de Trente se mettent en quête de preuves de la sainteté du petit Simon. Le premier miracle est enregistré le 31 mars 1475, preuve aux yeux des croyants locaux que l'enfant est bien un martyr, alors que les premiers aveux ne sont extorqués aux malheureux suppliciés qu'à partir du 7 avril.
Plus de cent miracles furent directement attribués au « petit saint Simon » dans l’année qui suivit sa disparition. Le culte du jeune Simon de Trente se propagea à travers l'Italie et l'Allemagne et fut confirmé (ce qui équivaut à une béatification) en 1588 par le pape Sixte-Quint, qui le proclame martyr et saint patron des victimes enlevées et torturées.
La même année, Sixte V le canonise et approuve qu'une messe spéciale en l'honneur du « petit Simon » soit dite dans le diocèse de Trente .
En 1965, au début du Concile Vatican II, l'Église commence à ré-enquêter sur cette histoire et les dossiers du procès sont rouverts. Après avoir reconnu l'affaire comme frauduleuse, le culte de saint Simon est aboli par le pape Paul VI et l'autel qu'on lui avait élevé est démoli. On le retire du calendrier et il est désormais interdit de le vénérer. Mais cette interdiction n'est pas respectée par tous.
En 2001 les autorités locales de la Province autonome de Trente organisèrent une prière commune des Catholiques et des Juifs à l'emplacement de l'ancienne synagogue juive de Palazzo Salvadori, en signe de réconciliation entre la ville et la communauté juive.

[...]

À lire également : L'étoile du temple. À Troyes, en l'an 1306, [...]. Note : la Rachel de ce roman est la grand-mère de la Rachel du Sang de Venise.

Cette chronique de lecture est originellement parue le 28 septembre dans Les livres de Mazel, blog sur lequel vous pouvez lire d'autres articles de Mazel.
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